LEAVES OF GRASS
Réal.: Tim Blake Nelson
Avec: Edward Norton (x2), Tim Blake Nelson, Keri Russell, Richard Dreyfuss, Susan Sarandon
Tout d'abords, j'aimerais remercier les allumés de La Pellicule Brule (Bruce, Marc et surtout Mat que je soupçonne d'avoir écrit la majeure partie de l'article) pour le petit coup de projecteur qu'ils m'ont donné dans ce Celebrity Deathmatch entre moi et Alexandre "Viciously Sharp" Mathis, et qui m'a bien fait marrer (alors que j'étais au boulot!). Donc, merci les mecs!
On sent clairement l'influence des frères Coen (qui avaient pratiquement révélés Tim Blake Nelson en acteur dans O BROTHER WHERE ART THOU) dans ce LEAVES OF GRASS où Edward Norton s'amuse à jouer le rôle de deux frères jumeaux aux tempéraments diamétralement opposés. FARGO, notamment, me vient à l'esprit avec son humour noir faisant constamment osciller le film entre comédie et drame.
Mais Tim Blake Nelson n'a malheureusement ni l'expérience, ni le talent de ses illustres modèles.
Alors que les frères Coen excellent dans l'art de mixer de manière homogène les éléments burlesques et tragiques de leurs histoires, Nelson a en effet choisi, peut-être de manière involontairement maladroite, d'alterner clairement les scènes comiques et dramatiques de façon parfois brutale. Donnant l'impression, au final, de nous livrer un film que l'on pourrait presque qualifier de "maniaco-dépressif".
Dans LEAVES OF GRASS, Edward Norton interprète à la fois Bill Kincaid, un professeur de philo brillant et reservé, et son frère jumeau Brady, un plouc extraverti dealer d'herbe. Mis à part leur ressemblance physique, le seul point commun entre les deux est leur intelligence, qui a permis à l'un d'enseigner à l'université et de faire la couverture de magazines spécialisés, et à l'autre (dont on apprend par la mère, jouée par Susan Sarandon, qu'il dispose en fait d'un QI supérieur à celui de son frère) de monter un labo hyper pointu où faire pousser une herbe de qualité supérieure. Les raisons pour lesquelles Brady "oblige" son frère à revenir au bled se révéleront avoir des conséquences tragiques pour l'un comme pour l'autre.
Norton donne un peu dans la caricature pour son interprétation de Brady au début du film mais parvient à lui donner un peu plus de subtilité à partir du moment où ce dernier se fait couper les cheveux, pour finalement nous montrer qu'il n'a rien perdu du talent qui lui avait permis de lancer sa carrière directement dans la cour des grands grâce à son rôle un peu similaire dans PRIMAL FEAR. Mais le two-men-show de Norton est pratiquement le seul attrait du film.
Contrairement à ce que pourrait faire penser la bande-annonce, LEAVES OF GRASS n'est en effet pas vraiment une comédie. Personnellement, je ne me suis d'ailleurs pas marré en la voyant malgré quelques sourires ça et là. En réalité, les moments (supposés) comiques laissent plusieurs fois la place à des scènes violentes qui transforment radicalement le ton du film aux moments où elles apparaissent. Loin d'atteindre la subtilité des frères Coen, Tim Blake Nelson me donne plutot envie de comparer son film au KINDERGARTEN COP (Un Flic à la Maternelle) d'Ivan Reitman, dont les 3/4 sont une comédie laissant finalement la place, dans le dernier quart, au genre de film violent dont Schwarzenegger était plus habitué.
Dans LEAVES OF GRASS, Nelson s'amuse à alterner les scènes de comédie et de violence au point que l'on pourrait parfois se demander s'il ne s'agit pas de deux films différents, découpés puis collés ensemble par un monteur facétieux. Si l'on ajoute à celà une pseudo histoire d'amour (entre Norton/Bill et Keri Russell), un drame psychologique (entre le même Norton et Susan Sarandon), tous deux tellement effleurés et mal développés qu'on peut les qualifier de baclés, et une tentative complètement ratée d'envelopper le tout dans un ton mélancolico-philosophique (avec des réflexions plutot naïves sur la recherche de la vérité), et le résultat final s'avère carrément bancal, de sorte que le film se casse la gueule.
A vouloir trop mélanger les genres, Tim Blake Nelson donne seulement l'impression qu'il maitrise son film mais il finit en fait par ne plus savoir sur quel pied danser. Dommage, car en additionnant les casquettes de réalisateur, acteur et scénariste (oui, il a également écrit l'histoire), Nelson démontre qu'il dispose d'une palette de talents étonnamment large et plutot prometteurs. Sa seule erreur est d'avoir été trop ambitieux sur ce coup là. Le même film, réalisé par les frères Coen, aurait peut-être donné quelque chose de plus mémorable.
Sortie française: 08 Septembre 2010