TURF 1/5
Scénario: Jonathan Ross
Dessins: Tommy Lee Edwards
Je suis tombé il y a quelques jours sur des news annonçant que le prochain projet de Matthew Vaughn, le réalisateur de KICK-ASS, serait l'adaptation de cette BD. C'est comme ça que j'ai appris que l'auteur, Jonathan Ross, n'en était non seulement qu'à son coup d'essai dans le monde des comics mais aussi qu'il fait partie des plus célèbres présentateurs de TV en Grande-Bretagne.
Ross est en effet aussi connu là-bas qu'Arthur ou Delarue en France. Réputé pour avoir été le présentateur le mieux payé de la BBC dans les années 2000 et pour son coté provocateur qui lui a valu dernièrement d'être carrément suspendu pendant 12 semaines sans solde, Ross a également gagné plusieurs récompenses aux BAFTA (l'équivalent britannique des Oscars, mais qui inclut aussi les productions télévisuelles) comme meilleur "entertainer".
"Ouais, OK, mais qu'est-ce qu'y vient foutre dans les comics?"... Je me suis posé la même question que vous, dites donc!
Il se trouve que Jonathan Ross est passioné de comics depuis toujours, au point d'avoir fait un documentaire sur le "Greta Garbo" du comics, Steve Ditko; d'avoir donné "Kirby" comme deuxième prénom à son fils (en hommage à Jack Kirby); et d'être l'un des meilleurs potes de Neil Gaiman. Ross est également marié à Jane Goldman, qui a eu la charge d'adapter le scénario de KICK-ASS pour le film, et c'est Mark Millar lui-même qui a persuadé Ross de coucher sur le papier les idées de BD qu'il trimballait depuis des décennies dans sa tête.
Et le résultat est donc ce TURF. Un mélange hybride entre une histoire de gangsters, d'horreur et de science-fiction.
L'histoire de TURF débute en effet en février 1929, à New York. La crise de 29 n'a pas encore eu lieu mais la Prohibition bat son plein depuis une dizaine d'années. Le bootleggers sont donc au pic de leur gloire avec des réseaux parfaitement huilés et une clientèle pas encore ruinée. C'est dans ce contexte que Ross nous raconte son histoire de guerre des gangs avec une composante originale: la nouvelle bande qui souhaite prendre le contrôle du "turf" New-Yorkais est un clan de vampires. Ah oui, j'oublie de préciser que "turf" ne fait aucunement référence à quelque sport hippique que ce soit. Ce mot désigne en fait le territoire controlé par un gang.
A cela s'ajoute (assez subrepticement dans ce premier numéro) un vaisseau extra-terrestre qui vient se crasher dans une forêt non loin de Coney Island.
Des gangsters... des vampires... et des extra-terrestres. Voilà ce que vous trouverez dans TURF.
La plus grosse surprise: ça fonctionne! Jonathan Ross est parvenu à mêler les genres de façon brillante (bien qu'il soit encore trop tôt pour dire si les aliens arriveront à se fondre harmonieusement dans le paysage) en se focalisant sur une histoire de gangsters plausible et en traitant les ingrédients surnaturels sur le même ton que le reste. Les vampires boivent du sang et glissent sur les courants d'air mais à part ça, ils sont tout à fait... euh...humains. Et les extra-terrestres sont eux-mêmes des bootleggers!
L'histoire démarre à cent à l'heure et malgré une tendance à noyer les pages d'une surabondance de textes et de dialogues, Ross semble promettre un récit riche et passionant sans que le rocambolesque de son récit ne bascule dans le grandguignol. Un véritable tour de force.
Tommy Lee Edwards officie aux dessins. Si vous avez lu le MARVEL 1985 de Mark Millar, vous avez déjà eu un aperçu de son talent. Sans que j'arrive à définir pourquoi, je trouve son style très "français". Un style à la fois cinématique mais aussi "sketchy", un équilibre parfait entre sens du détail et surréalisme qui colle parfaitement au projet de Ross. Dommage, encore une fois, que les pages soient inondés de bulles énormes. (je sais, c'est pas évident sur les images que j'ai choisi mais le reste de la BD est vraiment... balloneuse!)
Coup d'essai transformé, donc, pour Jonathan Ross qui signe avec ce TURF une oeuvre aussi divertissante qu'originale. Ross semble savoir où il veut aller avec son histoire extravagante et s'il arrive à maintenir la qualité narrative du premier épisode, j'ai envie de croire que l'ensemble sera mémorable.
Tommy Lee Edwards & Jonathan Ross